dimanche, octobre 13, 2024

Rachida Kaaout, Haut-commissaire des diasporas africaines en France : « Il faut reprendre possession des richesses de l’Afrique »

En marge du Forum MEDays qui s’est tenu du 02 au 05 novembre à Tanger, le site d’information dédié à la promotion de la femme africaine « lesafricaines.net » a tendu son micro à la franco- marocaine Rachida Kaaout, présidente Groupe politique « Ivry C’est Vous ». Conseillère municipale dans la ville d’Ivry-sur-Seine en région parisienne, elle est par ailleurs Haut-commissaire des diasporas africaines en France.

 Dans cet entretien, elle revient sur son parcours professionnel et politique mais également sur la création du Haut-commissariat des diasporas africaines et ses ambitions pour l’Afrique.

 Pouvez-vous revenir brièvement sur votre parcours professionnel ?

Je suis titulaire d’un master en commerce et relations internationale après des études en économie à la Sorbonne. J’ai intégré le monde du travail à travers le secteur privé en tant que directrice des achats, pour une grande société en France. Ensuite, je me suis occupée des affaires de feu Bernard Tapie (homme d’affaires et homme politique français décédé le 3 octobre 2021) dans le développement avec plusieurs sociétés mais toujours en rapport avec ma formation initiale.

Comment êtes-vous arrivée sur la scène politique française ?

La politique est venue me chercher quand Emmanuel Macron est devenu président de la République. En effet, on m’a contactée parce que parallèlement à mes activités professionnelles j’avais monté une association dénommée « au fil de l’Aube ». Une association qui accompagne les jeunes de la banlieue dans la réalisation de leurs projets et à trouver des financements.

 C’est là que la République en Marche m’a appelée pour me proposer de faire partie de cette Société civile. C’était un peu le pari du président Macron pour une nouvelle construction politique de la France.

J’ai été parmi les premiers investis aux élections municipales dans la ville d’Ivry-sur-Seine. J’ai porté une liste qui s’appelle « Ivry et vous » dans un bastion communiste depuis plus de 100 ans.

 Nous avons aujourd’hui la satisfaction d’avoir fissuré ce mur communiste et d’avoir fait 15% lors des dernières élections avec trois sièges d’élus d’opposition. Nous travaillons pour la construction d’une nouvelle énergie à Ivry-sur-Seine loin de tous ces tracas que nous causent les communistes ou les groupes d’extrêmes gauches de la région. 

Vous êtes la présidente du Haut-commissariat des diasporas africaines, pouvez-vous revenir sur vos missions ?

Alors dans la continuité de mon engagement politique, j’ai également fait campagne pour les derrières élections législatives. Je me m’y suis présentée pour être la députée des Français de l’étranger sur la 9ème circonscription, dont le Sénégal, par exemple, fait partie.  J’ai été amenée à faire campagne également au Sénégal et le Haut-commissariat est né de toutes ces rencontres et sollicitations qui émanaient de ces franco-sénégalais, ivoiriens, marocains, entre autres…

 Ces binationaux m’ont fait part d’une problématique qui est incontestable à savoir finir avec toutes ces discriminations en France pas seulement avec des mots, mais en faisant de la communication autour de tous ces grands thèmes que sont la victimisation, la discrimination, l’égalité des chances.

C’est bien de faire de la communication pour sensibiliser mais il faut passer à l’action et le Haut-commissariat ambitionne de travailler avec une nouvelle méthode.  Notre objectif est d’actionner en éduquant, en éveillant les consciences sur qui est l’autre.

 Je pense que la France n’est pas raciste, il s’agit juste de la méconnaissance de l’autre. Nous allons travailler sur des points précis que sont l’éducation, la santé, l’environnement et l’égalité des chances.

Il faut impérativement inscrire, dans les textes de la République, des propositions de lois qui doivent être portées par des députés. Nous devons aussi proposer pour basculer, de manière significative, vers une nouvelle ère qui est celle de la France plurielle.

 Chaque enfant de la République n’est pas en fait exclu du système. Un citoyen a des droits et des devoirs. Chacun doit assimiler cette notion de citoyenneté.

L’un des points forts sur lequel travaille le Haut-commissariat est la notion de citoyenneté. Nous voulons et souhaitons qu’il y ait la compréhension de la part des binationaux et de leurs enfants sur cette notion de citoyenneté.

Le deuxième volet que couvre le Haut-commissariat est le développement en Afrique car les binationaux sont tournés vers les relations Sud-Sud.

Nous avons un réservoir de compétences. Les diasporas ne sont pas un problème, mais plutôt une solution, une richesse.  Elles sont porteuses de deux connaissances (venant de l’Europe et de l’Afrique) qui peuvent être, pour l’Afrique, des vecteurs de développement dans les secteurs de l’’environnement, la santé et l’éducation, nos fers de lance.

L’égalité homme- femme est aussi un volet important dans nos missions. Car la femme est ce moteur qui insuffle le changement de par sa capacité à éduquer et à participer à la vie de la cité à travers de nombreuses activités.

Le Haut-commissariat accompagne des projets de developpement dans les pays respectifs des diasporas représentées au sien du Haut-commissariat. Elles ont un rôle à jouer et ont toute leur place en Afrique, un continent bouillonnant qui offre d’énormes perspectives.

Il faut reprendre possession des richesses de l’Afrique pour ces concitoyens et dans l’intérêt de ces populations et pour son développement.

Quelles sont les réalisations qui ont été faites par le Haut-commissariat depuis sa création ?

Nous avons proposé en France, lors de la conférence de presse du 14 octobre dernier, le droit de votes des étrangers lors des élections municipales. Il s’agit d’un sujet que nous portons parce qu’un européen a le droit de voter lors de ces élections municipales.  Est-ce une forme de discrimination ? On se pose la question sachant que finalement c’est une personne lambda qui contribue qu’au sein de sa ville.

Par ailleurs, il existe certaines conditions à réunir pour pouvoir voter. Nous avons porté ce premier projet de vote afin que les étrangers puissent voter lors des prochaines élections municipales. Le droit de vote des étrangers est un signal fort qu’envoie la France à toute cette diaspora présente sur son territoire pour dire que la France est plurielle.

Sur le continent africain, nous allons travailler sur des sujets très importants qui sont en rapport avec l’éducation, la santé etc. Nous allons accompagner la création d’une entité qui formera aux métiers du paramédicales parce qu’il y a une forte demande et certaines régions d’Afrique ont un grand manque concernant la médecine. Les femmes seront formées également pour accompagner, au sein de leurs localités, la population sur le volet santé.

Selon vous, quel rôle jouent les femmes dans la médiation et le processus de paix au niveau des diasporas africaines en France et sur le continent africain ?

La grande originalité du Haut-commissariat des diasporas de France est d’avoir créé une commission de médiation qui est pilotée par les femmes. Elle permettra de voir dans quelle mesure elles peuvent accompagner les processus de paix afin d’apaiser les tensions entre pays, entre localités, ou entre ethnies.

Les femmes ont un rôle très important à jouer dans ce sens parce que ce sont de très bonnes communicantes. Ce sont aussi des personnes apaisées qui, de par leurs vécus, ont une certaine manière d’aborder les choses en utilisant leur double ou triple casquettes en tant que mère, chef d’entreprises ou autre.

Nous sommes convaincus qu’en formant les femmes à la médiation, elles peuvent au sein de leurs régions respectives faire avancer les choses et constituer de ponts entre les gouvernements et les diasporas. Des cellules de médiation sont prévues à travers les régions où nous avons des points d’entrés.

Quelles sont les difficultés que rencontrent les femmes des diasporas africaines en France ?

Elles ne rencontrent pas des difficultés à mon avis, mais ont plutôt besoin de points d’amélioration. Les femmes issues des diasporas africaines souhaitent jouer un rôle dans leurs pays d’origine.

Il faut juste leurs donner les moyens pas que financiers mais mettre en lumière toutes les possibilités qu’elles ont pour être actrices sur le continent africain.

Le Haut-commissariat participe à accompagner ces femmes qui souhaitent s’investir de manière significative en laissant derrière elles, tout ce qu’elles ont eu comme héritage en France et aller à l’aventure au sein du continent africain.

Il n’y a pas réellement de difficultés, il faut trouver la manière de les accompagner et c’est valable également pour la gent masculine.

Il y a aussi nos retraités qui souhaitent rentrer. Nous avons créé la passerelle intergénérationnelle au sein du Haut-commissariat pour que la jeune génération aide les ainés à renter aux pays à s’installer et continuer à avoir leurs droits en France.

Quel message lancez-vous aux dirigeants africains à l’endroit des diasporas africaines ?

Nous demandons aux dirigeants africains de mettre en place un bureau dédié qui serait le pont d’entrée et de contact du Haut-commissariat des diasporas africaines de France. Cela facilitera la diaspora à faire les démarches administratives au sein de leurs pays d’origine.

Il faudrait aussi un bureau basé en France qui sera le point de contact, de relais et de facilitateur afin d’obtenir toutes les informations nécessaires en partenariat avec les gouvernements de nos pays.

Aujourd’hui, il n’est pas facile d’entreprendre en tant que citoyen de la diaspora africaine alors que nous encourageons l’entreprenariat qui sera la clé de développement de toutes les régions de nos pays respectifs.

Comment vous vous organisez pour faire en sorte que les diasporas africaines puissent agir dans leurs pays ?

Nous avons décidé de nommer des référents dans chaque pays qui compose le Haut-commissariat des diasporas africaines de France. Ces derniers auront la mission de cartographier les régions et de mettre en place des responsables ou facilitateurs qui permettront aux diasporas de s’installer dans le pays d’origine en trouvant facilement toute l’infrastructure qui leurs accompagneront ainsi que les interlocuteurs adéquats.

 Nous lançons ainsi un appel à toutes les personnalités qui se sentent capables de porter ce projet qui est d’une très grande responsabilité à nous rejoindre.

Propos recueillis par Ndeye Magatte Kebe

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