La prise d’El-Fashir par les Forces de soutien rapide (RSF) a révélé une réalité glaçante : pour les femmes du Darfour, il n’existe désormais plus aucun lieu où se réfugier, se protéger ou simplement survivre. Celles qui ont réussi à fuir décrivent un environnement où les violences, meurtres, viols systématiques, enlèvements ne sont plus des actes isolés mais un mode de terreur généralisé.
Les témoignages recueillis par ONU Femmes font état d’exactions d’une brutalité extrême. Des femmes rapportent avoir été agressées en pleine rue, séparées de leurs enfants, ou violées lors de fouilles menées par des combattants des RSF. D’autres racontent des raids ciblés, des attaques de drones et des civils abattus sans distinction.
Pour Anna Mutavati, directrice régionale d’ONU Femmes pour l’Afrique orientale et australe, la situation dépasse l’entendement : « Le corps des femmes devient une scène de crime au Soudan. Il n’existe plus d’espace sûr où elles puissent se réunir, se protéger ou même accéder aux services psychosociaux les plus essentiels. »
Cet effondrement du tissu de protection est aggravé par la destruction ou l’inaccessibilité des centres d’écoute, des structures de santé et des services humanitaires. Les espaces traditionnellement utilisés par les femmes à savoir les écoles, les centres communautaires, et lieux de culte sont désormais soit vidés, soit ciblés par les combats, soit contrôlés par des groupes armés.
La chute d’El-Fashir, le 26 octobre, a consolidé l’emprise des RSF sur l’ensemble du Darfour dans un conflit qui dure depuis plus de deux ans et demi. Mais elle a aussi marqué un tournant symbolique notamment la disparition du dernier bastion où existaient encore des réseaux de protection et des mécanismes de soutien aux victimes.
Dans un contexte de famine aiguë, où 11 millions de femmes et de filles sont exposées à une insécurité alimentaire extrême, cette absence totale de sécurité aggrave encore la vulnérabilité des populations féminines. Faute d’accès à la nourriture, aux soins ou à l’aide humanitaire, beaucoup se retrouvent confrontées à des choix impossibles à savoir fuir, affronter les violences ou mourir de faim.
Pour les organisations de défense des droits humains, la situation d’El-Fashir est le symptôme d’un effondrement plus large : celui des protections fondamentales garanties par le droit international humanitaire. Tant que les mécanismes de sécurité resteront paralysés et que l’accès humanitaire sera bloqué, affirment-elles, les femmes du Darfour demeureront livrées à elles-mêmes.

